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Les Lois de l'UX : 3 principes de psychologie que tout développeur devrait connaître

Pourquoi ce bouton doit-il être si gros ? Pourquoi simplifier ce menu ? Derrière des demandes qui semblent subjectives se cachent des lois de la psychologie. En voici 3, pour décoder la logique des interfaces et mieux dialoguer avec les designers.

Image abstrait d'un smartphone et d'une route
Source de l'image : lummi.ai

En tant que développeur, votre quotidien est guidé par la logique. Vous cherchez à écrire un code propre, efficace et maintenable, en évitant les répétitions inutiles et le fameux code spaghetti. Mais qu'en est-il de l'utilisateur final ? Son cerveau aussi a son propre système d'exploitation, avec ses règles, ses limites et ses raccourcis.

Ce qui peut sembler être une simple préférence de design est souvent une solution pragmatique qui respecte le code source du cerveau humain. Cet article vous présente trois des principes fondamentaux de la psychologie, qui vous aideront à mieux comprendre la logique derrière chaque interface que vous construisez.

1. La Loi de Hick : moins de choix = moins de complexité (pour l'utilisateur et pour votre code)

Image illustrative décrivant la loi UX de Hick
Source de l'image : https://lawsofux.com/hicks-law/

Le principe est très simple : plus un utilisateur a d'options devant lui, plus il mettra de temps à prendre une décision.

C'est la fameuse "paralysie de l'analyse" : face à trop de choix, la meilleure action devient souvent de ne rien faire et de quitter la page.

L'exemple le plus flagrant se trouve sur n'importe quel site e-commerce. Imaginez arriver sur une page qui vous présente ses 500 produits d'un coup, sans aucun guide. Ce serait le chaos. C'est pour cette raison que tous les bons sites appliquent la Loi de Hick, souvent sans le savoir. Au lieu de tout montrer, ils proposent :

  • Des filtres pour réduire le nombre de résultats visibles.
  • Une barre de recherche pour permettre à l'utilisateur de cibler son besoin.
  • Des recommandations ("Les plus populaires", "Featured") pour orienter la décision.

En réduisant le bruit, on clarifie le signal.

Ce principe n'est pas que théorique, il a un impact commercial direct. Une célèbre étude a montré qu'un stand avec 6 choix de confitures générait 10 fois plus de ventes que le même stand avec 24 choix, car les clients n'étaient pas paralysés par l'abondance d'options. Plus proche de nous, le site de voyages Expedia a augmenté ses profits de 12 millions de dollars par an simplement en supprimant UN SEUL champ optionnel ("Nom de l'entreprise") de son formulaire de réservation.

L'impact pour le code

Et pour vous, développeur, quel est le bénéfice ? L'impact est direct. Un écran avec moins d'options, c'est souvent un composant avec moins de "props" et une gestion d'état plus simple. Un parcours en plusieurs étapes se traduit par une série de petits composants faciles à maintenir, plutôt qu'un seul composant "usine à gaz" qui gère des dizaines de cas de figure. En bref, une interface qui respecte la Loi de Hick mène quasi systématiquement à un code plus propre, plus modulaire et plus facile à tester.

2. La Loi de Fitts : la taille (et la distance) comptent vraiment

Image illustrative décrivant la loi UX de Fitts
Source de l'image : https://lawsofux.com/fittss-law/

Cette loi explique que le temps nécessaire pour atteindre une cible est directement lié à la distance qui nous en sépare et à la taille de cette cible.

Autrement dit, un élément doit avoir une taille adéquate et être placé au bon endroit pour être facilement et rapidement cliquable. C'est le fondement même de l'ergonomie des interfaces.

L'exemple parfait est sous nos yeux tous les jours sur mobile. Pensez au bouton flottant "+" sur X (Twitter) pour poster un message. Il est grand et placé en bas à droite de l'écran. Pourquoi ? Parce qu'il se trouve directement dans la "zone du pouce" (thumb zone), le rendant quasi instantanément accessible. Imaginez maintenant ce même bouton, mais tout petit et coincé dans le coin supérieur gauche de l'écran. Il serait non seulement difficile à atteindre, mais le risque de fausse manipulation serait énorme.

L'impact pour le code

Et pour le développeur, qu'est-ce que ça change ? Au-delà de mieux comprendre la frustration utilisateur, cela donne un sens concret à des spécifications qui peuvent sembler arbitraires. Ce min-height: 44px ou ce padding: 16px sur un bouton dans une maquette n'est pas un chiffre au hasard. Il est directement inspiré des guides d'ergonomie des plus grandes entreprises tech, comme Apple qui recommande une zone cliquable minimale de 44x44 points, et Google qui préconise 48x48 dp. Ces standards sont basés sur des études (notamment du MIT) montrant que la pulpe du doigt d'un adulte mesure en moyenne 10 à 14 mm, soit... environ 44 pixels.

3. La Loi de Jakob : ne cassez pas les habitudes de vos utilisateurs

Source de l'image : https://lawsofux.com/jakobs-law/

Cette dernière loi est la plus simple. Elle indique que les utilisateurs passent la plupart de leur temps sur d'autres sites que le vôtre.

En arrivant sur votre application, ils s'attendent donc à retrouver des fonctionnements qu'ils connaissent déjà. Respecter ces conventions leur évite de devoir apprendre un nouveau modèle mental et rend l'expérience immédiatement familière.

Ce "modèle mental" fonctionne à deux niveaux. D'abord, il y a les conventions globales du web, apprises au fil des années : un logo en haut à gauche ramène à l'accueil, une loupe signifie "Rechercher", un panier d'achat est en haut à droite. Réinventer ces standards universels crée une friction inutile.

Ensuite, il y a le modèle mental lié à l'application que vous construisez. Après des mois d'utilisation, vos utilisateurs fidèles ont construit des habitudes solides avec votre interface. C'est là que l'exemple des refontes majeures devient parlant : en proposant un lien pour alterner entre l'ancienne et la nouvelle version, des géants comme Gmail ou YouTube n'offraient pas une simple "porte de sortie". C'était une stratégie de transition douce, un moyen de donner à l'utilisateur le contrôle sur son apprentissage.

L'impact pour le code

Et pour le développeur, c'est une excellente nouvelle. Cette loi justifie et encourage l'utilisation de librairies de composants éprouvées pour des éléments standards comme les checkbox, les toggles ou les modals. Pourquoi passer des jours à développer un sélecteur de date "original" alors que celui d'une librairie est instantanément reconnaissable ? La Loi de Jakob vous libère : elle vous permet de vous appuyer sur des bases solides pour concentrer votre talent sur ce qui rend votre application unique.

Comprendre la logique de l'utilisateur est finalement la meilleure façon de construire un code qui a du sens.

La loi de Hick, la loi de Fitts, la loi de Jakob... Ces principes nous rappellent une chose essentielle : le design d'interface est un équilibre entre une esthétique soignée et des principes scientifiques, qui s'appuient sur des règles observables pour créer des expériences intuitives.

Comprendre cette logique enrichit la collaboration. Une spécification sur la taille d'un bouton n'est plus un simple détail visuel, mais une décision fondée sur l'ergonomie. Le code prend alors une autre dimension : chaque composant devient une contribution directe au confort et à l'efficacité de l'utilisateur.

En partageant ce langage commun, le design et le développement ne travaillent plus seulement en parallèle, mais poursuivent le même objectif ultime : apporter de la simplicité dans un monde complexe.

Pour aller plus loin

Cet article s'inspire des travaux de Jon Yablonski. Pour explorer plus en détail ces trois lois et en découvrir bien d'autres, son excellent site Laws of UX est une ressource incontournable.

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